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Les Marées

Les forces en jeu

Aspect statique

La cause première des marées est bien entendu la loi de l'attraction universelle dont la formule est :

où F désigne la force de l'attraction entre deux corps éloignés d'une distance d et de masses respectives m1 et m2, G étant la constante de la gravitation.

Lorsque l'on raisonne sur des corps réels, c'est-à-dire non réduits à un point, la loi de l'attraction universelle s'applique en considérant le centre de gravité des corps. La distance considérée est celle des deux centres de gravité, et le mouvement de chaque corps se calcule comme si la force de gravité ne s'appliquait qu'aux centres de gravité de ces corps.

Ainsi donc, un astre de masse M dont le centre de gravité est à une distance d du centre de la Terre lui imprimera une accélération dirigée vers cet astre, dont l'intensité sera .

Et en effet, le Soleil et la Lune (ainsi que tous les autres astres d'ailleurs) attirent la Terre et lui impriment une accélération, de même qu'ils sont attirés et accélérés par la Terre. Cette accélération ne fait pas tomber les astres les uns sur les autres car leur vitesse les maintient à distance l'un de l'autre.

Comme on peut voir sur le schéma ci-dessous, si l'accélération appliquée à un objet le fait tomber sur terre en une trajectoire parabolique, dans l'espace, les vitesses sont si importantes que l'objet ne retombe pas et parcourt une trajectoire elliptique.

En réalité, les deux objets tournent autour de leur centre de gravité commun, mais dans la pratique, lorsque les masses des objets sont très différentes, on peut considérer en première approximation que le plus gros est immobile et que l'autre tourne autour de lui.

Lorsqu'un corps est situé sur un tel objet soumis à une accélération, il est soumis à une force d'inertie de direction inverse à celle de l'accélération et dont l'intensité est égale à l'accélération multipliée par sa masse. C'est cette force d'inertie qui plaque les passagers contre leur siège lors d'une forte accélération et qui les projette en avant lors d'un freinage brutal. Lorsque l'accélération est due au fait que l'objet tourne autour d'un autre, la force d'inertie est alors appelée force centrifuge.

Tous les corps situés sur la Terre sont donc soumis aux forces d'inertie dus à l'accélération de la Terre vers la Lune et le Soleil. Cependant, ces forces sont à-peu-près compensées par l'attraction de ces mêmes astres, à-peu-près, mais pas totalement comme nous allons le voir.

Considérons l'action d'un seul astre, de masse M et dont le centre de gravité O2 est situé à distance d du centre de la Terre O1.

La Terre est donc soumise à une accélération d'intensité vers cet astre, et donc tous les objets situés sur Terre sont soumis à une force d'inertie opposée à cette accélération et d'intensité égale à leur masse multipliée par (flèches bleues).

Chaque objet est également soumis à l'attraction de l'astre, l'intensité de cette attraction étant égale à la masse de l'objet multipliée par où d représente cette fois la distance de l'objet au centre de gravité de l'astre (flèches rouges). En fait, cette distance n'est pas tout à fait égale à la distance entre le centre de la Terre et le centre de gravité de l'astre.

Pour un objet situé au point A, au plus loin de l'astre, la force d'inertie est supérieure à l'attraction, la distance de cet objet au centre de gravité de l'astre étant d+r, d étant la distance du centre de la Terre au centre de gravité de l'astre et r étant le rayon de la Terre. La résultante des deux forces sera alors une force tendant à éloigner l'objet de l'astre, dont l'intensité est donnée par la différence entre l'inertie et l'attraction, c'est-à-dire égale à la masse de l'objet multipliée par .

De même, pour un objet situé au point B, au plus près de l'astre, l'attraction sera supérieure à l'inertie, la distance de cet objet au centre de gravité de l'astre étant d-r. La résultante des deux forces sera alors une force tendant à rapprocher l'objet de l'astre, dont l'intensité est donnée par la différence entre l'attraction et l'inertie, c'est-à-dire égale à la masse de l'objet multipliée par .

Ces deux résultats fournissent une formule non intuitive au premier abord : l'intensité des forces de marées provoquée par un astre est inversement proportionnelle au cube de la distance de l'astre. Ceci explique pourquoi la Lune a plus d'effet sur les marées que le Soleil, alors que l'attraction de ce dernier est plus importante.

On remarquera également un autre phénomène : les forces d'inertie et d'attraction ne sont généralement pas alignées, ce qui donne des forces résultantes dirigées vers le centre de la Terre au plus loin de la droite reliant les deux centres de gravité, ou horizontales à mi-parcours. La figure ci-dessous montre ces forces résultantes.

Cette figure montre également la forme qu'aurait la mer si elle recouvrait entièrement la surface de la Terre (la rotation de la Terre et donc la force centrifuge à l'équateur n'est pas prise en compte ici). Cette figure peut se voir soit comme une vue au-dessus des pôles, soit comme une vue au-dessus de l'équateur.

Le renflement des eaux est dû d'une part aux forces verticales qui augmentent ou diminuent l'attraction terrestre, mais également aux forces horizontales qui accélèrent le déplacement de l'eau.

Deux astres provoquent des phénomènes de marée perceptibles sur la Terre, la Lune et le Soleil. Ces forces de marée se superposent. La résultante est maximale lorsque Terre, Lune et Soleil sont alignés, et minimale lorsque les droites Terre-Lune et Terre-Soleil forment un angle droit.

Aspect dynamique

Le phénomène de marée est impressionnant par son aspect dynamique, c'est-à-dire les variations de niveau de la mer au cours de la journée. Ces variations sont dues à la rotation de la Terre, qui provoque une variation de la force de marée en chaque point de la Terre. Cette force étant d'égale intensité au plus près et au plus loin de l'astre considéré (Soleil ou Lune), la périodicité de la marée est donc d'environ 12 heures (en fait 12 h 25 mn car la Lune tourne en même temps autour de la Terre).

Cependant, les choses se compliquent lorsqu'on prend en compte l'inclinaison de l'axe de la Terre et la déclinaison de l'orbite de la Lune. La symétrie est moins bonne, les forces de marée étant différentes d'une demi-journée à l'autre. La période est alors 24 heures (en fait 24 h 50 mn, à cause de la rotation de la Lune), cette période étant composée de deux-demi-périodes de 12 heures semblables, mais légèrement différentes.

L'inclinaison de cet axe sur l'écliptique (et donc par rapport au Soleil) est maximale aux solstices, et nulle aux équinoxes.

Composantes périodiques de la marée

Les principales périodes intervenant dans les phénomènes de marées sont les suivantes :

Autres influences

Aux influences des astres peuvent se superposer deux influences météorologiques dont l'impact est loin d'être négligeable :

Les ondes de marée

Description

La mer ne recouvre pas toute la surface de la Terre. De plus, l'influence des astres est plus importante dans les grands fonds marins (Atlantique, Pacifique) qu'au bord des côtes. En fait, la marée prend principalement naissance au milieu des océans et se propage vers les côtes en ondes de marées, de la même manière qu'un caillou jeté dans une mare provoque des ondes circulaires autour du point d'impact (les ronds dans l'eau). Ceci explique pourquoi les marées retardent toujours sur la Lune et pourquoi la mer n'est pas haute à la même heure dans des ports pourtant peu éloignés l'un de l'autre.

La propagation de ces ondes de marée dépend fortement de la forme des terres ; elles entrent de plus en résonance selon la configuration des côtes, ce qui a pour effet d'amplifier certaines composantes, le plus souvent la composante semi-diurne qui peut amener des amplitudes de presque 20 m au Canada dans la baie de Fundy ou 15 m dans la baie du Mont Saint-Michel. Ailleurs, c'est la composante diurne qui peut être amplifiée, provoquant alors une seule marée par jour, généralement de faible amplitude, par exemple dans le golfe du Mexique (amplitude de 60 cm). On trouve plus souvent des types de marées mixtes, avec deux pleines mers et deux basses mers par jour, mais d'amplitudes très inégales.

Analyse harmonique

Il est à peu près impossible de déterminer la courbe du niveau de l'eau à un endroit donné en calculant l'action du Soleil et de la Lune et la propagation de l'onde de marée.

Le calcul s'effectue par la mesure de la variation de la hauteur de l'eau sur de longues périodes. Ces mesures sont faites à l'aide d'un marégraphe (voir photo), construction permettant la mesure sans être perturbé par les vagues.

Le principe du calcul est de considérer que la fonction donnant la hauteur de l'eau en fonction de la date et de l'heure est la somme de fonctions sinusoïdales de périodes connues, correspondant aux différentes influences du Soleil et de la Lune ; les paramètres à déterminer sont alors l'amplitude et la phase de chacune de ces composantes.

Les périodes de ces composantes se déduisent de la période des différents phénomènes astronomiques liés au Soleil et à la Lune.

Parmi ces ondes, certaines ont une période multiple des ondes de base, et sont a priori produites par des interactions non linéaires entre les ondes de base.

Chaque port est donc caractérisé par une série de coefficient, donnant l'amplitude et la phase pour chaque onde considérée. Plus le nombre d'ondes prises en compte est important, plus le calcul sera précis.

Sites intéressants

Service Hydrographique et Océanographique de la Marine (SHOM)

Le SHOM est un organisme d'état qui édite les annuaires officiels de marée pour la France. Son site propose des explications détaillées sur le phénomène de la marée, ainsi qu'une prédiction de marée, limitée cependant à 7 jours dans le futur.

Voir à l'adresse : http://www.shom.fr/fr_page/fr_act_oceano/maree/maree_f.htm

Ifremer

Ce site propose également des explications sur le phénomène de marée.

Voir à l'adresse : http://www.ifremer.fr/lpo/cours/index.html

Logiciels

Il existe de nombreux logiciels permettant de calculer les marées. Certains sont payants, comme celui du SHOM, d'autres sont gratuits, et même souvent en open-source (licence GPL), et sont donc fournis avec leurs sources.

Les logiciels gratuits sont moins précis que les logiciels payants, car ne disposant pas d'informations aussi complètes que les organismes officiels : là où le SHOM utilise plus de 100 ondes pour le calcul de ses marées, ces logiciels n'en utilisent que quelques dizaines (apparemment une question de propriété intellectuelle sur les coefficients).

Le plus connu de ces logiciels est XTIDE, pour Unix, disponible aux adresses http://www.flaterco.com/xtide et http://harmonics.unh.edu/xtide/files.html.

Une version pour Windows est WXTide32, disponible à l'adresse http://www.wxtide32.com/.

On trouve également une version pour Palm Pilot à l'adresse http://www.toolworks.com/bilofsky/tidetool/.

Hervé Jamet
Août 2004

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