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La plupart des gens associent la relativité à Albert Einstein et à la fameuse formule E=mc2 et aux applications pratiques qui en sont résultées, c'est-à-dire l'énergie nucléaire, bombe et centrale. Peu de gens savent par contre qu'Einstein a été brillamment précédé par Poincaré qui avait déjà posé une bonne partie des bases de la relativité restreinte, et trouvé cette fameuse formule ; ceci n'enlève par ailleurs rien au mérite d'Einstein qui a par la suite confirmé son génie en étendant la relativité (la première théorie de la relativité est appelée relativité restreinte et la deuxième relativité générale).
En fait, le terme "relativité" s'oppose à la notion d'absolu. Cet antagonisme relatif-absolu s'applique aux repères spatio-temporels. Définissons donc d'abord ce qu'est un repère spatio-temporel : il s'agit tout bêtement des coordonnées permettant de localiser un événement quelque-part (partie spatiale), ainsi que l'heure et la date de cet événement (partie temporelle). Des exemples de coordonnées spatiales peuvent être la latitude et la longitude d'un point, ainsi que son altitude. Il y a bien entendu une infinité de repères possibles ; trois coordonnées sont toujours nécessaires pour caractériser la position de n'importe quel point, ce que nous pouvons traduire en disant qu'il y a trois dimensions spatiales ; l'heure est caractérisée par une seule coordonnée, constituant donc une quatrième dimension.
Un repère est généralement caractérisé par une origine, dont les coordonnées sont nulles par convention et trois axes. Le temps constitue la quatrième coordonnée, avec, elle aussi une origine (par exemple le 1er janvier de l'an 1 à minuit) à partir de laquelle on peut dater tout événement dans l'unité désirée (jour, minute ou seconde par exemple).
Selon le repère choisi, un point n'a bien entendu pas les mêmes coordonnées. Il existe donc des formules mathématiques permettant de convertir des coordonnées d'un repère vers l'autre. Si ces deux repères sont immobiles l'un par rapport à l'autre, le temps n'intervient pas dans ces formules. Par contre, si ces repères sont en mouvement, par exemple un repère dont l'origine est sur le quai d'une gare et un autre repère dont l'origine est dans un train en mouvement, le temps interviendra dans la conversion.
La question qui vient alors à l'esprit est de savoir si tous les repères se valent, ou s'il existe des repères "privilégiés" plus naturels. On pourrait par exemple estimer qu'un repère immobile est plus naturel qu'un repère en mouvement ; ceci traduirait le fait qu'il existe un absolu à vitesse nulle et qu'il serait alors toujours possible de déterminer qu'on est en mouvement, même si c'est le paysage qui semble avancer par la fenêtre du train.
Les principes de la relativité consistent à dire que tous les repères sont équivalents ; cette affirmation peut aller très loin comme nous allons le voir ci-après.
Entre deux repères immobiles l'un par rapport à l'autre, en existe-t-il un privilégié ? Au moyen-age, l'opinion la plus couramment répandue était que la Terre se situait au centre de l'Univers et que tout, Soleil et étoiles, tournait autour d'elle. Cette croyance désignait le centre de la Terre comme étant le centre de l'Univers ; ce point pouvait alors être considéré comme l'origine spatiale de référence, aucun autre point ne pouvant occuper une position aussi privilégiée dans l'Univers.
Puis, nous avons découvert que la Terre tournait autour du Soleil, que le Soleil n'était qu'une petite étoile dans un coin de la Voie Lactée, et que cette dernière n'était qu'une galaxie parmi d'innombrables autres.
La théorie du Big-Bang pourrait peut-être nous désigner un point particulier dans l'Univers, celui où tout a commencé. Nous sommes malheureusement démunis pour déterminer un tel point, et il n'est même pas certain qu'il ait une signification physique.
Donc, nous pouvons dire que tous les points de l'Univers se valent pour constituer l'origine d'un repère, même si, à l'évidence, le choix de certains points est plus pratique que d'autres.
Lorsque deux points bougent l'un par rapport à l'autre, peut-on dire que l'un est immobile et l'autre en mouvement ? En d'autre termes, existe-t-il un état immobile absolu par rapport auquel on pourrait mesurer toutes les vitesses ? Là encore, on a longtemps cru que le mouvement ne pouvait se maintenir que si on appliquait un effort (une force) et qu'il s'arrêtait si la force s'arrêtait. On a découvert assez rapidement qu'il n'en était rien et qu'un mouvement uniforme gardait la même vitesse indéfiniment si aucune force ne lui était appliquée (y compris bien entendu les forces de frottement).
Il en résulte que deux points en mouvement uniforme l'un par rapport à l'autre sont équivalents, ce qui a été traduit par la formule "le mouvement est comme rien".
Pour résumer, deux repères ayant les mêmes axes, et dont les deux origines sont immobiles ou en mouvement uniforme l'une par rapport à l'autre sont totalement équivalents.
Plus tard, on a découvert que la vitesse de la lumière était finie, environ 300000 km/s. Et ce constat a posé un gros problème : quelle était la signification d'une telle vitesse, par rapport à quoi était-elle mesurée ? Une chose était certaine, elle ne pouvait pas être identique dans deux repères en mouvement l'un par rapport à l'autre, puisque les vitesses ne sont pas identiques lorsqu'on passe d'un repère à l'autre si ces deux repères ne sont pas immobiles l'un par rapport à l'autre. Lorsque dans un train, vous croisez un train en sens inverse, vous le voyez aller à une vitesse beaucoup plus élevée, en fait la somme de votre vitesse et de la sienne.
En fait, la lumière étant une onde, on se demandait quel était son support de propagation, de la même façon que le son se propage dans l'air (dans le vide, le son ne se propage pas); on appela ce support hypothétique l'éther. Ce support, censé baigner tout l'univers, aurait fourni un repère absolu pour la vitesse. Et comme la Terre tourne sur elle-même, la vitesse d'un point de la surface du globe par rapport à cet éther devait varier selon l'heure ou selon l'emplacement ; mieux, lorsqu'on n'était pas immobile par rapport à cet éther, la vitesse de la lumière ne devait pas être la même dans toutes les directions.
Hélas, toutes les expériences effectuées montrèrent que la vitesse de la lumière était rigoureusement constante quel que soit le repère depuis lequel on la mesurait, ce qui défiait tout raisonnement logique basé sur la composition classique des vitesses entre elles.
L'éclair de génie d'Einstein fut de prendre ce constat comme postulat de base : quel que soit le repère dans lequel on se trouvait, la vitesse de la lumière était toujours la même. La conséquence était que le passage d'un repère à un autre était plus complexe, et que, non seulement les coordonnées spatiales étaient affectées, mais également les coordonnées temporelles. La conséquence était qu'un objet se déplaçant très rapidement, à une vitesse non négligeable par rapport à celle de la lumière, vieillissait beaucoup moins vite ; ce fait a été effectivement constaté sur des particules à durée de vie limitée dans les accélérateurs de particules.
L'une des conséquences de la relativité restreinte est qu'il est impossible de dépasser la vitesse de la lumière : en effet, quelle que soit la vitesse à laquelle on est parvenu, la lumière est pour nous toujours aussi rapide, c'est-à-dire qu'on est toujours aussi loin de la vitesse désirée.
De toutes façons, dans l'univers de la relativité restreinte, voyager plus vite que la lumière est équivalent à remonter le temps. Même la notion classique de simultanéité n'existe plus en relativité restreinte. On ne peut dire qu'un événement est antérieur à un autre si un signal issu de l'événement antérieur et arrivant à l'événement postérieur a voyagé à une vitesse au plus égale à celle de la lumière. Si ce n'est pas le cas, les deux événements sont indépendants et, selon les repères, peuvent se produire dans un ordre chronologique quelconque. On voit donc bien que, si quelque chose voyageait plus vite que la lumière, il se trouverait un repère pour lequel ce quelque chose remonterait le temps.
La relativité restreinte traitait de deux repères en mouvement uniforme l'un par rapport à l'autre. La relativité générale traite des repères en mouvement non uniforme l'un par rapport à l'autre, c'est-à-dire en mouvement accéléré. L'hypothèse audacieuse d'Einstein est de postuler que localement, accélération et attraction universelle sont équivalentes. Toute masse courbe l'univers et c'est cette courbure qui dévie la trajectoire des corps, un peu comme des bosses ou des creux sur un terrain de pétanque qui dévieraient les boules. Le plus intéressant est que cette courbure de l'univers dévie également les rayons lumineux, comme cela a été vérifié lors d'une éclipse, et qui explique actuellement les mirages gravitationnels observés par les astronomes.
Hervé Jamet
Août 2003 - revu en août 2004
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